52

Je suis médecin alcoologue, ex médecin de famille, installé sur Lyon en libéral.

Pour quelles raisons je conseille vivement à l’entourage des buveurs de rejoindre un groupe Al Anon, comme je conseille aux buveurs de rejoindre les AA ?

  1. Les proches sont en souffrance et ont besoin d’être entendu.
  2. Cette souffrance est partagée par tout le système familial mais elle éclipse toutes les autres chacun pensant que c’est uniquement le buveur qui a un problème, faisant pression sur lui pour qu’il se corrige.
  3. L’alcoolique, qui devient le centre négatif de la situation, se sent cerné et impuissant, ce qui participe à accroitre sa consommation. Il se désiste de ses responsabilités et se cantonne dans l’accusation de lui-même et des autres.
  4. Le conjoint dépense beaucoup d’énergie pour faire face en s’oubliant lui-même. Une co- dépendance peut s’installer, le buveur étant addicte à l’alcool et son conjoint addicte à la situation devenue centrale pour lui.
  5. Au fur et à mesure des années un nouvel équilibre s’installe où les enfants se rapprochent du parent non buveur, les plus grands étant parentalisés. Tous peuvent tirer de la situation des bénéfices secondaires. Une plus grande liberté par exemple.
  6. Il en résulte une certaine résistance au changement. Par exemple au retour de cure de leur mère, des enfants ont mis une bouteille de blanc au frigidaire expliquant qu’avant, « on était bien avec papa et on pouvait aller se coucher quand on voulait ».
  7. La fréquentation d’un groupe Al-Anon permet de sortir du piège de la co-dépendance, chacun réinterrogeant ainsi ses propres souffrances existentielles ce qui l’aide à redonner un sens à sa vie. Ce questionnement de l’entourage permet souvent au buveur, qui n’est plus le centre du monde, de sortir de sa passivité et de se poser ses propres questions qui vont l’amener à s’arracher l’alcool.

 

Dr Pierre RADISSON

Auteur de « Alcool et addiction, de l’emprise à la liberté » éditons Nouvelle Cité